Wasteland, un film d’exception

Des œuvres pornos du calibre de Wasteland, on n’en voit apparaître que toutes les décennies. Véritable succès critique de 2012, la dernière réalisation du talentueux Graham Travis (Portrait of a Call Girl) est un must-see.

Sorti en DVD avec le magazine Hot Vidéo N°260 - février 2013, Wasteland récolte tous les suffrages, auprès des professionnels du X et des fans du genre ; une œuvre qui abolit en quelque sorte les limites entre porno et film d’auteur. Finement scénarisé et shooté avec style (certains plans nocturnes rappellent - toutes proportions gardées - cette manière qu’a Michael Mann de capter le pouls de la nuit en milieu urbain, avec ses sources lumineuses de couleur out of focus), le film se situe au confluent entre le film indé (calibré pour Sundance) et le hard scénarisé, en une réminiscence lointaine des glorieuses 70’s/80’s.

Les deux héroïnes sont magnifiquement interprétées par les deux Lily (Carter & LaBeau), qui nous livrent des performances à fleur de peau, sensibles et à même de susciter l’empathie envers leur personnage. Pour une fois, on n’a pas l’impression d’admirer des hardeuses tentant vainement de jouer, mais de véritables actrices incarnant des personnages troublants de réel.

Visuellement grandiose, via une utilisation pertinente des caméras numériques modernes, Wasteland évite l’écueil des œuvres formalistes qui prennent la pose de façon gratuite. La technique est au service du récit et les scènes de sexe - sporadiquement disséminées - ne sont pas en reste, dégageant une troublante impression d’intimité et participant totalement à la progression narrative.

En bref, très peu de défauts sont à signaler (on peut toujours chicaner sur le manque de scènes hard - les enjeux sont autres - ou l’appel à des acteurs estampillés gonzo pour la partouze finale, alors que l’on aurait définitivement voulu tirer la page sur leurs tics verbaux/performatifs), mais un nombre confondant de qualités font de Wasteland une œuvre précieuse, construite sur un long crescendo à la Sam Peckinpah (comme l’avait si bien fait remarquer Pierre Cavalier dans les pages du Hot Vidéo N°259 - janvier 2013) jusqu’à cette partouze finale proprement (quoique…) tétanisante.

Lily Carter et Lily LaBeau dans Wasteland (Elegant Angel)